Tir de défense
Principe général
Malgré la protection de l’espèce, des dérogations à l’interdiction de destruction de l’espèce peuvent être autorisées, sous certaines conditions. Le cadre du système dérogatoire est précisé par l’arrêté du 21 février 2024.
Ces dérogations peuvent être accordées sous trois conditions cumulatives :
- de prévenir des dommages importants à l’élevage. Les troupeaux concernés doivent être soumis à un risque de prédation,
Les tirs dérogatoires sont donc rendus possibles uniquement dans un objectif de réduction de la prédation, et non dans un objectif de régulation de l’espèce. - qu’il n’existe pas d’autres solutions satisfaisantes. Les troupeaux concernés doivent être protégés, ou reconnus non-protégeables,
- que la dérogation ne nuise pas à l’état de conservation du loup. Les tirs peuvent être mis en œuvre tant que le plafond maximal autorisé n’est pas atteint. Ce plafond est calculé comme un pourcentage de l’effectif total estimé par l’OFB.
Le dispositif dérogatoire est proportionnel aux dommages : il apporte une réponse graduée au risque de prédation.
Les tirs de défense sont mis en œuvre à proximité des troupeaux. Les moyens visant à provoquer des réactions chez les loups afin de faciliter leur détection par les tireurs ou à attirer les loups à proximité des tireurs ou les contraindre à se rapprocher sont strictement interdits.
Le matériel utilisé est encadré, ainsi que la formation des tireurs et le contrôle technique des opérations.
Tir de défense simple
Une autorisation de tir de défense simple (TDS) peut être délivrée à des troupeaux protégés et soumis à prédation.
Il peut être mis en œuvre par deux tireurs maximum par lot d’animaux (voire 3 sous certaines conditions).
Tir de défense renforcée
En cas de récurrence de la prédation malgré la mise en place des mesures de protections et malgré la mise en œuvre des tirs de défense simple, il est possible d’autoriser des tirs de défense renforcée (TDR).
TDR individuel
Il peut être autorisé si un troupeau a subi au moins trois prédations dans les 12 derniers mois, suite à la mise en œuvre - au moins deux fois - de son TDS.
TDR communal
Il permet de prendre en compte la prédation diffuse à l’échelle d’une commune. Il peut être autorisé si au moins trois prédations sont constatés au cours des 12 derniers mois chez des éleveurs ayant mis en œuvre - au moins deux fois - leur TDS respectif.
Cas des espaces protégés
Dans les cœurs de parcs nationaux et dans les réserves naturelles nationales constituées pour des motifs incluant la conservation de la faune sauvage, une réglementation s’applique pour préserver la biodiversité.
TDS | TDR | |
---|---|---|
cœur de PN dont le décret interdit la chasse (PNE, PNV, PNM…) | interdit | interdit |
cœur de PN dont le décret autorise la chasse (PNC…) | > peut être autorisé après passage en conseil d’administration et avis du directeur. > 1 seul tireur max |
interdit |
RNN constituée pour un motif incluant la conservation de la faune sauvage | interdit | interdit |
Et la non-protégeabilité ?
Certains lots ou troupeaux peuvent être reconnus non-protégeables. Sur la base d’une analyse technico-économique réalisée au cas par cas et soumise pour avis au préfet coordonnateur du plan national d’actions sur le loup, un ou plusieurs troupeaux ou une partie d’un troupeau peuvent être reconnus comme ne pouvant être protégés par le préfet de département.
Ils sont alors exemptés de la mise en place de mesure de protection pour bénéficier d’une autorisation de tir dérogatoire.
Cas des bovins
Sous certaines conditions, les troupeaux bovins peuvent bénéficier d’une autorisation de tir dérogatoire. Nous vous invitons à contacter votre DDT(M) si vous êtes un éleveur intéressé par ces dispositions.
Attention, la notion de non-protégeabilité ne doit pas être confondu avec la Zone Difficilement Protégeable (ZDP). La ZDP est un ensemble de communes alors que la non-protégeabilité est étudiée à l’échelle de l’exploitation.
Efficacité des tirs de défense
Il existe des incertitudes quant à l’effet des tirs sur la prédation à l’échelle nationale. À l’échelle du troupeau concerné par le tir de défense, on peut constater une baisse de la pression de prédation. On présent cependant des phénomènes compensatoires :
- la meute peut se déplacer sur le troupeau voisin (pas de variation dans le bilan global des dommages, car la prédation est reportée mais non supprimée),
- si l’individu tué appartient au couple reproducteur (couple alpha), la structure sociale de la meute se retrouve affaiblie et il y a un risque de création d’une nouvelle meute (dynamique naturelle de formation d’une nouvelle meute accélérée) et d’une augmentation de la prédation.
Une thèse a été menée entre 2019 et 2021 sur l’effet des tirs sur la prédation (OFB-CNRS). Si l’analyse montre que les tirs sont bien réalisés à l’issue d’une période de forte pression de prédation, elle montre en revanche qu’il n’y a pas ou peu d’effet notable des tirs sur l’intensité de la déprédation post-tirs dans les 2/3 des massifs alpins analysés (tous les cas de figure ont été rencontré : baisse durable de la prédation, augmentation de la prédation, ou pas de changement).
Une multitude de facteurs ont été explorés pour comprendre les variations d’efficacité des tirs sur un loup, par exemple le sexe et l’âge des loups tirés, ou encore l’altitude des pâturages où avaient lieu les tirs. Si la plupart d’entre eux n’ont pas révélé d’influence sur l’effet des tirs, la saison d’application du tir d’un loup en revanche, apparait comme importante à considérer. On constate ainsi un effet de diminution de l’intensité de prédation après les tirs d’automne, contrairement aux tirs du printemps ou de l’hiver qui étaient suivis par une augmentation de la prédation. Les tirs d’un loup pendant la saison estivale rejoignaient la tendance générale, à savoir une absence d’effet notable sur l’intensité de déprédation après leur réalisation.
Les résultats obtenus doivent donc être consolidés, avec notamment une approche par massif, qui permettrait d’intégrer des variables beaucoup plus précises. Ce sujet est notamment traité dans le cadre du programme de recherche.